Plusieurs hypothèses ont été émises pour identifier les ancêtres du Keris :
- Une origine indienne reprenant la forme d’une feuille à deux tranchants du Luristan.
- Une origine nord-asiatique reprenant la forme d’une hallebarde chinoise à base asymétrique.
- Une origine mythologique purement javanaise: elle aurait été forgée par le prince Panji, demi-dieu et héros du Wayang, seigneur de la Forêt Sacrée
Période animiste jusqu’au VIII°
Au II° ont lieu les premiers contacts entre l’Inde et Java. C’est vers cette époque qu’apparaît une arme courte dénommée Keris Purva Carita à lame droite en fer à deux tranchants .
Période Centre de Java (Early Classical) – fin VIII° à fin IX°
A partir du VIII°, la dynastie bouddiste des Shailendras règne sur le Centre de Java. Sur les bas-reliefs des temples de Borobudur et de Lara Jonggrand (Prambanan), on peut voir simultanément le Keris Purva Carita et son évolution, le Keris Buda ou Prambanan qui a une lame droite en laminated (feuilletage de 2 ou 3 métaux). Leurs caractéristiques communes sont :
- Une base évasée et asymétrique avec une ébauche de garde (Ganja) comme sur les Keris actuels.
- Un pommeau plat terminé par une demi-sphère, caractéristique des armes indiennes et moyen-orientales.
- Une lame en forme de feuille (leaf shape), particulière aux armes indiennes des périodes Gupta et post-Gupta, héritières des lames du Luristan.
Prambanan I: Un singe guerrier tient une lame à forme de feuille et pommeau en disque. Prambanan II: Laksmana tient un Keris Buda.
Les historiens s’accordent à dire que « ces lames en feuille sont représentées sur les vases peints de la Grèce antique et très probablement appartiennent à l’héritage aryen commun aux peuples indo-aryen ». L’influence indienne est constante.
Période Est de Java (Late Classical) – X° au XV°
A la fin du X°, le pouvoir s’installe dans l’est de Java. Suit une période d’instabilité du pouvoir jusqu’à l’établissement du royaume de Majapahit (1292). Les bas-reliefs du temple hindou de Panataran (1347 AD) montrent une évolution des formes: c’est le Keris Hindu Majapahit dont la poignée perd le pommeau. C’est important car on passe ainsi d’une arme de taille à une arme de pointe et d’une arme portée en baudrier à une arme portée contre soi. Elle devient une arme personnelle, portée quotidiennement, s’affine et s’allonge, …. tout en conservant sa solidité grâce aux alliages plus complexes du Pamor, apparu entre le X° et le XIII° à la suite d’une heureuse erreur de manipulation.
Pour rendre les Keris plus meurtriers, les lames à ondulations font leur apparition. A partir du XIV°, on parle de Keris modernes.
Prambanan I ( East Java period ): Hanoman, le roi des singes, utilise une version allongée du Keris de type Prambanan I (Temple de Panataran -XIV°).
Période musulmane à partir du XVI°
C’est sous le règne d’Agung, 1er Sultan musulman de Java, que le Keris connait son plus grand développement. Ils étaient exportés dans tout le Sud-ouest asiatique, accompagnant la poussée de l’Islam qui touche le Sud des Philippines en 1380. A l’arrivée de Magellan en 1521, pratiquement toute la zone, auparavant animiste ou bouddhiste, était musulmane. Sans concession à leur foi en ce qui concerne les croyances et religions supplantées, les Moros ont adopté le Keris avec ses pouvoirs et ses légendes anciennes. Tout au plus, les symboles les plus apparents (comme les poignées où Garuda, l’aigle de Vichnou, a été stylisé en quelques sculptures) ont été simplifiés et escamotés .
Pour le reste, les musulmans ont été, et sont encore aujourd’hui, parmi ceux qui respectent et perpétuent la vénération des Keris.
Keris Buda (XI° au XIII°) sans Pamor et avec une soie carrée.
Keris Buda XIV° (copie d’une forme de lame plus ancienne) mettant en évidence un Pamor par la forge de plusieurs métaux. La soie est carrée.
Keris XIV° Est de Java dont la lame allongée et plus légère ainsi que la soie ronde annonçe le Keris moderne. La forge est un essai de mélange de fer à gros grains avec des inclusions de nickel.
Keris de Knaud de type Buda XIV° (apogée du royaume Majapahit).
Sa lame en fer est recouverte sur les 2 faces d’une mince feuille de cuivre gravée de scènes du Ramaya (circa 1340).
Le hollandais Charles Knaud (1840 -1897) le reçut en présent d’un souverain de Yogyakarta. Conservé depuis dans sa famille en Hollande, il est depuis 2003 exposé au Tropen Museum d’Amsterdam.
A l’origine, la soie était carrée (poignée fixe) permettant l’utilisation en taille. Les arabes étaient habitués aux lames de cavaliers. Aux Philippines, sous des dénominations approchées (Kriss, Kris, Kalis, Kali, …), les Moro utilisent des lames puissantes, sans Pamor et avec des soies carrées autorisant la taille. Par contre, les Keris du monde indo-malais ont des soies rondes pour une utilisation en pointe (en orientant la poignée, la lame étant tenue entre le pouce et l’index et parallèle au sol, l’objectif étant de passer entre les côtes.).
L’angulation est primordiale dans l’utilisation de l’arme. Elle est pratiquement nulle dans les armes de taille. Par contre, l’angulation du Keris permet une pénétration intercostale vers les organes sensibles (coeur).
La disparition du disque du pommeau autorisait un port quotidien près du corps, glissé dans la ceinture du sarung. Et ce, grace aussi à l’affinement de la lame entraînant un moindre poids tout en restant solide et nerveuse depuis l’utilisation du Pamor.
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